Le non-paiement des fermages est-il constitutif d’une donation indirecte ?
En matière de succession, l’article 843 du Code civil oblige tout héritier à rapporter à ses cohéritiers tout ce qu’il a reçu du défunt par donation directe ou indirecte.
Cette règle est souvent source de litige lorsque l’un des héritiers a bénéficié gracieusement pendant de nombreuses années d’une mise à disposition par le défunt d’un bien immobilier faisant partie intégrante de la succession.
En d’autres termes, l’absence de perception de loyers en contrepartie de la mise à disposition doit-elle être considérée comme une libéralité ?
La Cour de cassation s’est à nouveau prononcée sur ce sujet.
En l’espèce, deux époux communs en biens avaient consenti sur leur exploitation agricole un bail à cheptel et un bail rural à l’un de leurs deux fils. Au règlement de la succession, le deuxième fils assigne son frère en justice en vue de le condamner au rapport à la succession des sommes qu’il aurait dû verser aux défunts parents au titre des deux baux.
La Cour d’appel lui donne raison en constatant l’absence de perception des fermages entre les défunts parents et le frère titulaire des baux.
Mais pour la Haute juridiction, ce constat est insuffisant. Les juges du second degré auraient dû également rechercher si, en sus de l’absence de perception des fermages, les défunts époux l’avaient fait dans une intention libérale, c’est-à-dire dans l’intention de s’appauvrir dans le but de gratifier leur enfant.
Cass., 1ère civ., 11 septembre 2024, n° 22-19.129
Image par Christel SAGNIEZ de Pixabay