Le défrichement d’un chemin confié par la commune à un exploitant n’est pas synonyme d’autorisation de cultiver, ni de renonciation à l’affectation de son usage au public.
Le fait pour une commune de confier la tâche de défricher un chemin à un exploitant agricole, sans pour autant lui autoriser de cultiver son assiette, ne traduit pas une renonciation de la commune à l’affectation dudit chemin à son usage au public.
En l’espèce, un exploitant agricole, chargé de défricher un chemin par une commune, prétendait cultiver cette partie, tout en arguant que la commune aurait délaissé son entretien et donc abandonné ledit chemin.
La CAA de Nancy n’est pas de cet avis : elle rappelle tout d’abord que l’utilisation du chemin comme voie de passage ou l’accomplissement réitéré d’actes de surveillance et de voirie de la part de l’autorité municipale, suffit à faire présumer l’affectation à l’usage du public (CRPM, article L. 161-2).
Par ailleurs, une commune n’est pas tenue à une obligation d’entretien (CE, 20 janvier 1984, n° 16617).
Se basant sur ces principes, le juge d’appel relève alors que :
- Au jour de l’octroi de l’autorisation de défricher, il n’est pas établi que l’emprise et le tracé de ce chemin rural n’auraient plus été visibles ;
- L’autorisation en question portait uniquement sur le défrichement et pas sur une possible culture, tout en indiquant que le chemin rural devait rester accessible.
En outre, la commune a, par deux courriers, rappelé aux exploitants que leurs cultures empiétaient irrégulièrement sur l’emprise de ces chemins et y a demandé le rétablissement de la libre circulation.
De manière plus générale, la commune avait aussi réitéré sa volonté de maintenir ou de rétablir l’affectation au public des chemins ruraux sur son territoire, incluant ceux oubliés et disparus, en publiant dans le journal communal un texte sur les règles entourant les chemins ruraux, et a investi dans l’achat de matériel pour assurer l’entretien des chemins ruraux.
Enfin, le juge d’appel, se basant sur le cahier des charges et sur le bail à ferme conclu par l’un des exploitants, rappelle que l’exploitant était tenu de laisser sur toute la longueur des lots loués un passage d’une certaine largeur correspondant au chemin en cause.
Compte-tenu de tous ces éléments, la CAA a considéré qu’il ne pouvait être soutenu que la commune avait abandonné l’affectation desdits chemins à leur usage du public, ni que cette dernière aurait autorisé leur culture par les exploitants chargés du défrichement.
CAA de NANCY, 15 octobre 2024, n° 21NC01990
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