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ECHANGES DE BIENS RURAUX : UNE TENTATIVE DE FRAUDE AU DROIT DE PREEMPTION DU PRENEUR EN PLACE ?

ECHANGES DE BIENS RURAUX : UNE TENTATIVE DE FRAUDE AU DROIT DE PREEMPTION DU PRENEUR EN PLACE ?

Les opérations d’échanges et cessions amiables de parcelles agricoles entre propriétaires permettent de regrouper des terres et d’améliorer leur exploitation.

Ces échanges peuvent comporter des soultes qui sont déterminées par accord amiable entre les intéressés, afin de compenser une différence de valeur vénale entre les immeubles échangés.

Lorsque les parcelles, objets de l’échange sont louées par bail rural à un ou des exploitants agricoles, le droit de préemption du preneur en place ne trouve pas à s’appliquer (CRPM, L. 412-3).
Toutefois, le preneur peut agir en nullité de l’acte, à charge pour celui-ci de démontrer l’intention des parties de contourner son droit de préemption.

Les faits sont les suivants : un bail rural était en cours au moment où leurs propriétaires ont conclu par acte authentique en date du 22 mars 2021 l’échange de leurs parcelles (environ 5 ha) contre des parcelles de plus faible surface et moyennant le paiement d’une soulte par le bénéficiaire de l’échange.

Le preneur en place, un GAEC, assigne les propriétaires en nullité de l’acte.

Il fait valoir notamment la disproportion de superficie et de valeur des biens échangés et l’importance des soultes prévues.

Ayant fait appel, il reproche aux juges du second degré d’avoir uniquement recherché l’intérêt du bénéficiaire de l’échange.

La Cour de cassation valide la décision d’appel. Pour elle, l’échange n’est pas frauduleux :

1/ L’évaluation des parcelles à un prix situé au-dessus du prix moyen des terres établi par la Safer est justifiée (accessibilité depuis la route, mécanisation possible, faible déclivité, etc.), la soulte n’est donc pas déraisonnable,

2/ La configuration des lieux présente une réelle cohérence avec d’autres parcelles déjà détenues par la bénéficiaire.
Par conséquent, l’intention de faire échec au droit de préemption du preneur en place n’est pas démontrée.

Cass., 3ème civ., 4 septembre 2025, n° 24-11.720