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Droit à indemnité en cas d’annulation d’un bail rural ?

Droit à indemnité en cas d’annulation d’un bail rural ?

Par un arrêt en date du 11 juillet 2024 (Cass., 11 juillet 2024, n° 22-20.052), la Cour de cassation vient définitivement mettre un terme à un litige opposant un exploitant-preneur et un nu-propriétaire devenu plein-propriétaire.

En l’espèce, des époux, propriétaires de parcelles agricoles, ont fait don de la nue-propriété de ces parcelles pour ensuite conclure des baux en leur qualité d’usufruitier, mais sans avoir obtenu l’accord de leur fils, nu-propriétaire.

Suite au décès des parents, ce dernier, devenu plein-propriétaire des parcelles, a alors sollicité la nullité des baux consentis sans son accord. L’exploitant avait alors invoqué le fait qu’il avait cru de bonne foi qu’il contractait avec le véritable propriétaire des lieux, argument rejeté par la Cour de cassation dans un premier arrêt (Cass., 6 février 2020, n° 18-23.457).

Dans le cadre du renvoi devant les juges du fond, le locataire a revendiqué une nouvelle fois la validité du bail rural et tenté d’obtenir l’établissement d’un compte de sortie. Les juges d’appel, bien que prononçant la nullité du bail rural, ont néanmoins fait droit à sa demande d’indemnité en tant que preneur sortant.

La Cour de cassation a alors été saisi par un second pourvoi visant à contester le droit à indemnité du preneur reconnu en appel.

Pour rappel, à la fin du bail, le preneur qui a amélioré le fonds loué a droit à une indemnité de la part du bailleur (CRPM, article 411-69). Reste que la résiliation et l’annulation d’un bail sont deux notions différentes : la première n’a d’effet que pour l’avenir, tandis que la seconde est rétroactive et a pour effet de remettre les parties dans l’état où elles se trouvaient avant la conclusion du bail annulé.

Or, un bail consenti par un usufruitier sans le concours du nu-propriétaire est sujet à annulation (Cass., 29 novembre 2018, n° 17-17.442) et pas à résiliation. Par conséquent, le bail annulé étant considéré comme n’ayant jamais existé, le « faux » preneur ne peut donc prétendre à un droit à indemnité tiré de ce bail.

De ce fait, la Cour de cassation annule une seconde fois le raisonnement tenu par le juge d’appel s’agissant du versement d’une indemnité.

En revanche, tout n’est pas perdu pour l’exploitant qui peut encore espérer obtenir une réparation, biens que moins importante, sur le terrain de la responsabilité. En effet, le fait pour un usufruitier de consentir seul un bail rural constitue une faute ouvrant au preneur le droit de lui demander réparation (Cass., 25 octobre 2018, n°17-11.276).

Cass., 11 juillet 2024, n° 22-20.052