Bail sur bail : lequel des deux prévaut ?
Dans cette affaire, le 1er juillet 2013, des propriétaires consentent un bail rural sur diverses parcelles à M. X qui les met à disposition de sa SCEA. Puis le 15 juillet 2015, ces mêmes propriétaires louent ces mêmes parcelles à une EARL. A noter que ce second bail est enregistré le 23 juillet 2015.
Par requête en date du 25 mai 2018, M. X et la SCEA saisissent le TPBR et demandent l’expulsion de l’EARL et indemnisation du préjudice subi.
La question posée aux juges est donc la suivante : quel bail prévaut sur l’autre ?
La Cour de cassation, pour rendre sa décision s’appuie sur les articles L. 411-4 du CRPM et 1328 du Code civil dans sa version antérieure à celle issue de l’ordonnance du 10 février 2016 (n° 2016-131).
Elle rappelle que les actes sous seings privés n’ont de date certaine contre les tiers que du jour où ils ont été enregistrés. Puis elle précise qu’ « en présence de deux baux successifs portant sur les mêmes biens consentis à des preneurs différents, le bail ayant acquis le premier date certaine est opposable au locataire qui, à cette date, était déjà en possession des biens loués en vertu d’un titre antérieur n’ayant pas date certaine si le preneur qui se prévaut de l’antériorité de son titre est de bonne foi, à défaut pour lui de connaître cette situation ».
Or, la Cour d’appel avait ordonné la libération des terres au profit de M. X et condamné l’EARL et les propriétaires et ainsi fait prévaloir le bail le plus ancien. En effet, pour celle-ci, le fait que certains des propriétaires aient indiqué avoir eu connaissance de la mise à disposition des terres louées par M. X au profit de sa SCEA, ne permettaient pas de remettre en cause la validité du bail du 1er juillet 2013. De plus, M. X démontrait avoir réglé des fermages jusqu’a minima l’entrée de l’EARL sur les terres.
Cassation de la décision. Pour la Haute juridiction, les juges auraient dû rechercher si l’EARL avait eu connaissance de l’occupation antérieure des parcelles par M. X et la SCEA en vertu du bail du 1er juillet 2013.
Ainsi le débat ne se concentre pas autour de la connaissance par les propriétaires de la conclusion des baux, mais sur l’opposabilité du bail au tiers et à la connaissance du contrat par le tiers, ici l’EARL.
Cet arrêt nous rappelle toute l’importance du bail écrit et de son enregistrement dont le coût est assez limité : 25 € (CGI, article 739).