Cession de bail : le preneur doit être de bonne foi tout au long de sa relation avec le bailleur
Les faits de l’espèce sont assez classiques, un bail copreneur, Monsieur et Madame, est conclu. Après plusieurs années, le bailleur délivre un congé fondé sur l’âge de ses preneurs. Ces derniers saisissent le Tribunal paritaire des baux ruraux en contestation du congé et Madame demande la cession du bail au profit de son descendant.
Pour se prononcer sur l’autorisation de cession, la Cour de cassation va vérifier la bonne foi du preneur. Ainsi, elle précise que « la cession du bail à un descendant est une exception au principe d’incessibilité du bail, réservée au preneur de bonne foi s’il s’est constamment acquitté de ses obligations légales et contractuelles envers le bailleur et que les manquements, même antérieurs au renouvellement du bail, peuvent justifier le refus de cession, peu important qu’ils ne se soient pas poursuivis après le renouvellement du bail. ».
Pour retenir que le preneur n’était pas de bonne foi, il a été constaté qu’il résultait du K-bis et des statuts du GAEC, bénéficiaire de la mise à disposition des parcelles, que de 1990 à 2010, que Madame n’était pas membre du GAEC. Par conséquent, la cession du bail lui a été refusé pour manquement à ses obligations contractuelles.
Cet arrêt interroge. En effet, nous avions en mémoire qu’un bail renouvelé est un nouveau bail. De ce principe, la Cour de cassation en avait déduit que le bailleur était dans l’impossibilité de demander la résiliation du bail pour des faits antérieurs à son renouvellement (Cass. 3ème civ., 21 janvier 2021 – résiliation pour non-paiement du fermage). Toutefois, dans l’arrêt de 2021, nous étions en présence d’une demande de résiliation. Le refus de prise en compte d’éléments antérieures au renouvellement du bail est compréhensif dans le sens où le bailleur aurait dû agir dès le constat de ces manquements et non après le renouvellement du bail.
Au cas présent, le litige porte sur le non-renouvellement du bail. Pour la Haute juridiction, la prise en compte d’éléments antérieures, et ce bien que le preneur ait régularisé la situation, permet de justifier le non-renouvellement du bail et, plus précisément ici, le refus de la cession du bail.
Le conseil est donc le suivant : si le preneur risque de ne pas être considéré comme de bonne foi à un moment quelconque du bail, ce dernier a tout intérêt à demander la résiliation de son bail actuel et d’en conclure un nouveau afin d’éliminer tout évènement qui pourrait lui être reproché.
Cass 3ème civ., 4 juillet 2024, n° 22-23.715
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