Bail rural verbal : la liberté de la preuve a ses limites
Monsieur L a reçu des parcelles en héritage. Son frère les a exploitées un certain temps, puis la société S est devenue l’exploitante.
Quelques années plus tard, Monsieur L a saisi le tribunal judiciaire afin d’obtenir l’expulsion de cette société qui exploitait selon lui, sans droit ni titre.
Après avoir rappelé que la preuve du bail rural est libre et ne nécessite pas forcément d’écrit (article L 411-1 et 4 du CRPM), le tribunal judiciaire a donné raison à la société S, qui revendiquait un bail rural verbal.
Les preuves étaient les suivantes :
– Existence d’un bulletin de mutation de terres MSA au profit de la société S,
– Versement des fermages par la société S aux nus-propriétaires, à la demande de Monsieur L qui en était devenu usufruitier (transmission à ses enfants),
– Témoignage du frère de Monsieur L, qui attestait que leur père avait consenti un bail à la société S.
Monsieur L a interjeté appel de cette décision. La Cour d’appel a alors tranché en sa faveur.
En effet selon elle, le bulletin de mutation de terres n’avait pas été signé par Monsieur L, ce qu’une expertise graphologique a confirmé. De plus, le seul fait que les fermages soient versés ne suffit pas à prouver un bail, d’autant qu’ils ont été versés aux nus-propriétaires alors que seul l’usufruitier est sensé les percevoir. Enfin, le témoignage du frère de Monsieur L ne peut être pris en compte, celui-ci ayant un intérêt au litige et n’étant donc pas objectif.
Conclusion : la preuve du bail rural est certes libre, mais rien ne vaut un bail écrit pour éviter toute contestation !
Cour d’appel de Colmar, chambre 2 A, 19 août 2022, n°20/02517